A l'honneur

Kevin Rougé rend hommage à ses collègues au sommet du Mont Blanc !

Kevin Rougé, 32 ans, infirmier au CHU de Montpellier depuis un peu plus d’un an, a décidé de se lancer un défi : gravir le Mont Blanc et rendre hommage à ses collègues des urgences. Dans cet échange, il nous explique son ascension, ses doutes et sa dédicace.

Publié le

Service : Médecine d'Urgence

Quelle est l'origine de ce projet d'escalader le Mont Blanc ?

J'ai un ami avec lequel on se lance beaucoup de défis. En 2018, on avait fait le Kilimandjaro et ce qui nous a plu c'est le mode trek, la survie et le dépassement de soi. Le Kilimandjaro est le toit de l'Afrique, on aimerait faire le plus de continents possible et le toit de l'Europe est officieusement le Mont Blanc.
On s'est préparé, on a trouvé un guide, bref nous étions prêt à y aller.
Mais voilà la veille du départ, mon ami a eu la covid. J'ai donc fait cette montée tout seul.

 

Combien faut-il de temps de préparation ?

Il n'y a pas de formule magique car plusieurs facteurs sont à prendre en compte comme l'expérience, la forme physique actuelle, l'habitude, etc.
Pour le physique, on peut se préparer en faisant du vélo, des squats car c'est important de préparer ses jambes. On peut faire de la course et de la nage car cela fait travailler le cardio.

 

Comment s'est passée votre ascension ?

Un guide était avec nous tout au long de l'ascension et comme nous allions rester 48 heures ensemble, il est important d'avoir de bonnes relations. La veille, nous sommes donc allés au café pour discuter et mettre en place tous les derniers réglages.
Le lendemain, nous avons pris le tramway du Mont Blanc qui nous a déposé au 1er refuge qui se situe à 2005 m.
Au début, c'était de la randonnée basique pendant 3/4 heures sur un sol pentu avec peu de neige. A partir de 3200 m, la difficulté à avancer commençait à se faire ressentir car il y avait beaucoup de neige : l'alpinisme commençait.
La journée la température oscillait entre O et 5°.
Le gros point noir a été le vent, du coup nous n'avions pas une très bonne stabilité : un coup à droite, un coup à gauche, c'était difficile d'avancer.
Ensuite, nous nous sommes arrêtés à un refuge pour manger et dormir. A ce moment-là, j'ai eu un GROS mal des montagnes ! J'ai eu des doutes sur mes capacités à poursuivre l'ascension. Mais j'ai essayé de mettre en pratique mes connaissances pour lutter contre ce mal : boire beaucoup d'eau et dormir. A cet instant, mon objectif était de continuer, et de partir vers 1h30 du matin du refuge afin d'arriver en haut pour le lever du soleil. Mon mal s'est dissipé et j'ai pu continuer !
L'ascension finale fut difficile car j'étais au bout du bout de mes réserves, physiquement c'était dur. Nous avons fini par arriver au sommet ; c'était vraiment beau mais on n'a pas eu le temps de profiter très longtemps car le vent étant très fort, il devenait difficile de tenir debout.
J'ai quand même pris le temps de profiter et de faire LA photo.

 

La descente a-t-elle été plus dure que la montée ?

On pense que c'est le plus facile mais ce n'est pas le cas. On est sur une grande pente où l'on doit faire l'effort supplémentaire de retenir son corps pour ne pas aller en avant, la fatigue se fait beaucoup ressentir. On a eu des éboulements, je devais écouter et suivre quasiment à l'aveugle ce que le guide me disait de faire afin d'éviter le moindre incident.
A un moment, il m'a ordonné plusieurs fois de courir, ce que j'ai fait dans un premier temps mais mes jambes me lâchaient, je ne pouvais plus avancer. Perdu pour perdu, je me suis mis face à la montagne, me tenant prêt à esquiver ce qui aurait pu m'arriver dessus mais cela s'est calmé et j'ai pu repartir.

 

Pourquoi avez-vous tenu à rendre hommage à vos collègues ?

Cette pensée pour mes collègues m'est venue car nous sommes en pleine pandémie mondiale et nous galérons beaucoup. Je suis aux urgences depuis plus d'un an, je me sens vraiment bien et j'ai ce sentiment d'appartenir à une équipe dans notre CHU.
Concernant le Mont Blanc, c'était une surprise, j'en avais parlé à une ou deux personnes mais la totalité du service n'était pas au courant. Je voulais symboliser que nous sommes tous ensemble dans les difficultés.
Au début, j'avais pensé à faire une petite dédicace sur une feuille lambda avec un mot écrit à la main puis je me suis souvenu que je connaissais quelqu'un au service communication du CHU. J'ai donc demandé si c'était possible d'avoir une vraie pancarte. Et on m'a fait quelque chose de propre et de très professionnel. Quand je suis arrivé au sommet j'ai pris l'affiche, je l'ai brandi, on m'a pris en photo, je l'ai envoyé sur le groupe WhatsApp où on est environ 200. Tout le monde était surpris et choqué mais ça leur a fait plaisir !
En fait, j'ai aussi fait cela parce que le service des urgences c'est un service où je me régale, je m'entends bien avec tout le monde. C'était vraiment une spéciale dédicace envers mon service. Mes copains d'abord !

 

Alors, quelle suite après le Mont Blanc ?

Sachant que c'est un investissement autant en termes de temps que d'argent je n'en referai pas avant au moins deux ans. Quand cela sera possible j'aimerais faire le camp de base de l'Everest qui se trouve à 5400 m pour voir l'Everest de plus près et savoir si c'est possible pour moi ou pas de le faire. Je pense aussi faire l'Aconcagua qui est le sommet de l'Amérique du Sud, il se situe en Argentine et culmine à 7000m.  »