La Diphtérie

Histoire de la maladie

La diphtérie est causée par plusieurs bactéries, des corynébactéries avec principalement Corynebacterium diphteriae et Corynebacterium ulcerans. Ces bactéries produisent la toxine diphtérique qui est responsable de la gravité de la maladie (6,9).

Cette maladie est connue depuis des siècles. Hippocrate faisait déjà la description d’une maladie dont les symptômes peuvent évoquer la diphtérie. Au IIème siècle, Galien décrivit ce qui ressemble à l’expectoration pseudomembraneuse diphtérique.

Puis il faudra attendre le XVIème siècle pour avoir à nouveau la mention d’une maladie ressemblant à la diphtérie. En effet, en 1557 le médecin P. Forrest est témoin à Alkenaër en Hollande d’une épidémie meurtrière de maux de gorge avec des ulcères sur les amygdales. Une épidémie semblable est constatée en Italie en 1563. Plusieurs grandes épidémies sont par la suite décrites avec une similitude dans la symptomatologie avec des dénominations différentes.

P. Bretonneau qui après avoir observé une épidémie en Touraine en 1818 va créer le terme de diphtérie (du grec « diphteria » qui signifie membrane).  Sa communication en 1821 à l’Académie de Médecine n’obtient pas un franc succès. Avec l’un de ses élèves ils vont alors exhumer des cadavres d’enfants enterrés le jour même ou la veille afin de décrire précisément la localisation des lésions. Par la suite, il fit la première description complète de la maladie dans un ouvrage publié en 1826 (6,9,16).

Jusque dans les années 1930, cette maladie était responsable de plusieurs milliers de décès chez les enfants par an (17). 

Eléments de clinique

La diphtérie due à C. diphteriae est une maladie très contagieuse. Elle est transmise de personne à personne par voie respiratoire par les gouttelettes de salive lors des contacts avec les malades ou des porteurs asymptomatiques. La diphtérie due à C. ulcerans se transmet par le lait cru ou les animaux de compagnie et peut produire les mêmes tableaux cliniques que C. diphteriae (9,18).

Les signes cliniques du tableau classique sont ceux d’une angine avec fièvre, gonflement du cou et maux de tête. Des fausses membranes caractéristiques recouvrent le voile du palais et les amygdales.  Elles peuvent être responsables d’une asphyxie en cas d’extension et entraîner la mort. De plus, du fait de la sécrétion d’une toxine, en cas de passage dans le sang il peut y avoir des complications graves au niveau du cœur et du système nerveux (17,18). 

Le vaccin

Histoire

Le bacille fut découvert en 1883 par T. Klebs et isolé en 1884 par F. Löffler, ce qui valut le nom de bacille de Löffler-Klebs. Par la suite, en 1889, E. Roux et A. Yersin apportèrent la preuve que la maladie n’est pas provoquée directement par la bactérie mais par la toxine qu’elle produit. Il s’agit de la première toxine mise en évidence.

En 1890, E. Behring et S. Kitasato démontrèrent la présence d’antitoxines dans le sang d’animaux après inoculation de toxine. E. Roux et ses collaborateurs mirent au point en 1891 un sérum antidiphtérique dont l’efficacité sera testée en 1894.

En 1923, G. Ramon réussit à transformer en un dérivé inoffensif la toxine diphtérique tout en maintenant son pouvoir vaccinant. Il lui donna le nom d’anatoxine diphtérique. La vaccination par l’anatoxine diphtérique entra rapidement dans la pratique (6,16).

Conséquences

La vaccination est rendue obligatoire au service militaire en 1931 puis obligatoire pour tous en 1938. Des campagnes massives furent organisées en 1942 et appliquées principalement en zone occupée, la vaccination diphtérique fut obligatoire en Allemagne en 1941.

Depuis la fin de la seconde guerre mondiale avec la généralisation de la vaccination et grâce à une bonne couverture vaccinale, la maladie est contrôlée en France. La dernière épidémie remonte aux années 1940. En 1945, environ 45 000 cas de diphtérie et 3000 décès ont été enregistrés. De 1990 à 2002, aucun cas de diphtérie n’a été déclaré. Depuis 2002, on assiste à une réémergence des cas dont la plupart sont des cas importés chez des personnes non ou mal vaccinées. L’efficacité du vaccin est excellente, selon les études 96% à 98% des nourrissons sont protégés (9,16–18).

La maladie de nos jours

En France

La diphtérie est une maladie à déclaration obligatoire. En France de 2002 à 2014, 17 cas de diphtérie ont été signalés. Parmi eux, il y avait 9 cas autochtones dont 8 localisés à Mayotte (département Français depuis 2011) et 8 cas importés. En 2011, un cas de diphtérie à C. diphteriae a été déclaré dans le sud de la France sans notion de voyage en zone d’endémie. Après identification de 53 cas contacts, un seul cas asymptomatique a été mis en évidence chez son partenaire. L’enquête a révélé que ces deux sujets avaient séjourné en Espagne les jours précédents et s’étaient rendus à une manifestation internationale. La transmission a pu se produire au cours de cet évènement (9,17–20).

A partir de 2003, la surveillance qui ne concernait que C. diphteriae s’est étendue à C. ulcerans producteur de toxines diphtériques. De 2003 à 2014, 33 cas ont ainsi été déclarés dus à cette bactérie (18,20).

Dans le monde

Dans certaines régions du monde, la maladie sévit encore, notamment en Asie du Sud-Est et en Afrique. En effet, l’Inde a été le pays signalant le plus de cas de 2011 à 2015 avec 18 350 cas suivi de l’Indonésie et de Madagascar avec respectivement 3203 et 1633 cas (18,22).

En Europe, un cas de diphtérie mortelle a été signalé chez un enfant en Espagne en 2015 et un cas en Belgique en 2016. Ces deux enfants n’étaient pas vaccinés. Ces évènements confirment la nécessité de maintenir une couverture vaccinale élevée pour ne pas voir réapparaître la maladie. Une baisse de cette couverture ferait augmenter le nombre de cas et entraînerait une épidémie comme ont été victimes les pays de l’ex-Union Soviétique dans les années 1990 (17).

Diphtérie
France
  • 1945 : 45000 cas de diphtérie et 3000 décès
  • 1990 : Disparition de la diphtérie
  • 2002 : Réémergence de la maladie secondaire à des cas importés chez des personnes non ou mal vaccinées
Monde
  • Inde : Au moins 18000 cas de 2011 à 2015
  • Indonésie : Plus de 3000 cas de 2011 à 2015
  • Madagascar : Plus de 1600 cas de 2011 à 2015
Information
  • Nombreux cas importés de pays encore épidémiques et à Mayotte