L’objectif premier de la chirurgie cérébrale en condition éveillée est de maximiser l’exérèse de la tumeur tout en préservant l’intégrité des réseaux fonctionnels afin de ne pas induire de séquelles. Développée au CHU de Montpellier en 2006 par le Pr Hugues Duffau, cette technique chirurgicale nécessite notamment l’intervention d’un professionnel spécialiste afin d’évaluer, au cours de la chirurgie mais également avant et après celle-ci, le langage et les autres fonctions cognitives du patient. L’orthophoniste, en tant que spécialiste de la parole, du langage et de la communication, a ainsi un rôle essentiel à jouer au sein de l’équipe entourant le patient. Depuis plus de 15 ans, Sylvie Moritz-Gasser assure cette mission, qu’elle partage depuis quelques années avec ses collègues neuropsychologues Guillaume Herbet et Anne-Laure Lemaître.
Grâce à l’évaluation continue du patient au cours de la chirurgie, le neurochirurgien peut établir une véritable cartographie cérébrale qui, au-delà du bénéfice clinique évident (augmentation significative de l’étendue de l’exérèse et maintien, voire même amélioration, de la qualité de vie), fournit des données précieuses pour la recherche. C’est ainsi qu’un modèle connexionniste d’organisation neuroanatomique du langage a été publié, mettant en évidence un fonctionnement dynamique en réseaux distribués de zones corticales et sous-corticales interconnectées par des faisceaux de substance blanche, et s’opposant radicalement à la conception classique localisationniste, aujourd’hui dépassée, du fonctionnement cérébral. Sur la base de ce modèle original, les travaux de recherche auxquels participe Sylvie Moritz-Gasser s’intéressent aussi aux mécanismes de plasticité cérébrale permettant au cerveau de réorganiser ses réseaux fonctionnels en cas de lésion. Mettre en évidence les patrons de réorganisation cérébrale les plus efficaces, c’est-à-dire associés aux meilleures récupérations fonctionnelles, et induire cette plasticité maximale par l’intermédiaire de protocoles de rééducation orthophonique spécifiques auprès de personnes présentant des pathologies neurologiques acquises constitue le socle du projet de recherche de Sylvie Moritz-Gasser, soulignant ainsi les interactions bidirectionnelles entre clinique et recherche.
« Comprendre les mécanismes de plasticité cérébrale permettrait d’orienter la stratégie thérapeutique orthophonique proposée aux personnes présentant des troubles acquis du langage »
Très impliquée dans la formation initiale au sein du Département Universitaire d’Orthophonie de Montpellier Sylvie Moritz-Gasser encadre régulièrement des mémoires de fin d’études. Le grade master (Bac + 5) désormais conféré au Certificat de Capacité d’Orthophoniste offre ainsi un avenir prometteur à la recherche en orthophonie, pour les jeunes professionnels désireux de poursuivre leur parcours universitaire vers un doctorat.
PORTRAIT EXPRESS
Après 15 années d’exercice libéral, Sylvie Moritz-Gasser a rejoint le pôle Neurosciences Tête et Cou du CHU de Montpellier. Détentrice d’un doctorat en neurosciences, elle est également maître de conférences à l’Université de Montpellier et responsable pédagogique du Département Universitaire d’Orthophonie à la Faculté de Médecine. Investigatrice principale d'un PHRIP en 2011, elle est par ailleurs titulaire d’une habilitation à diriger des recherches et a participé à 63 publications référencées SIGAPS dans les 10 dernières années, dont 4 en premier auteur et 4 en dernier auteur.