Quatre parcours de vie. Quatre témoignages. Quatre patientes racontent leurs difficultés mais aussi ce qui les motive. Rencontrées à l'occasion d'un traitement intensif ou d'une consultation au Centre de référence constitutif des maladies vasculaires rares (CRC-MVR) de l'hôpital St Eloi à Montpellier, elles partagent leurs expériences.
Vanessa : « Le sport est vital pour moi »
Clara : « Ma maman, mon papa et mes amis m’aident à me sentir bien »
Anne-France : « Le travail est primordial pour moi »
Zaynab : « Il faut faire ce qu’on aime et ne surtout pas se freiner ! »
J’étais au lycée lorsque les premiers symptômes sont apparus. Ma cheville était enflée mais je ne m’en suis pas occupée. Dès le début de mes études, mon pied s’est vraiment mis à gonfler. Les premiers temps ça ne m’inquiétait pas. Mais rendez-vous après rendez-vous, la réalité s’est imposée à moi : j’avais un lymphœdème primaire du membre inférieur droit et c’était définitif. Lorsque j’ai compris que mon rail n’était plus possible, je me suis effondrée. Ça a été dur de me dire que je devrais vivre avec ça. J’avais 20 ans. Mon parcours de vie a été chamboulé. J’avais commencé un BTS tourisme, je voulais voyager et accompagner des touristes. Cette option est soudain devenue inimaginable car je ne pouvais plus rester en position statique, debout. Mes rêves se sont envolés.
Cela fait trente que je vis avec. Je me débrouille mais il y a des phases… Aujourd’hui, je fais du yoga, c’est mon truc à moi, ça mobilise bien mon corps. Je marche aussi. Mais ce qui m’a stabilisé, c’est mon travail. J’ai passé un concours pour devenir fonctionnaire. Je suis secrétaire dans un établissement scolaire. Je vois du monde. Il y a une interaction avec les gens qui m’entourent. Travailler m’aide à ne pas penser à mon œdème (ressasser la maladie ne m’intéresse pas). Pendant longtemps, le regard des autres sur moi a été compliqué. J’essayais de trouver des combines pour cacher ma jambe. Ça ne fait qu’une quinzaine d’année où je vais mieux. Avant, j’avais honte. Par rapport à mon image, c’était compliqué. Socialement, je me suis renfermée. A cause du regard des autres, je me suis interdite de piscine pendant des années ! En réalité, personne ne nous regarde. Et quand bien même, au bout d’un moment, j’ai réussi à en faire fi. Être volontaire m’a aidé à passer des étapes.
Mes traitements : J’étais suivie par une kinésithérapeute. Elle est partie à la retraite. Ce sera compliqué d’en trouver un bien formé aux soins. Je ne m’en suis pas encore occupée… Je vais demander conseil à l’Association vivre mieux le lymphœdème de Montpellier (AVML). Du côté des contentions, j’en avais une qui me convenait parfaitement, mais elle ne se fait plus. Lorsque je l’ai appris, ça été un choc de plus. J’ai beaucoup de mal à en trouver une nouvelle (j’en suis au 6e essai à la pharmacie). Et le reste à charge, ce n’est pas rien !
Mon message : Ce qui m’a manqué c’est un soutien psychologique. Je ne l’ai pas fait à l’époque et je le regrette. Malgré le lymphœdème, malgré mes érysipèles, j’ai été dans le déni. Je me suis fait violence pendant des années pour ne pas le voir, ne pas le prendre en charge. J’ai mis des années à accepter de porter un bas de contention. C’est une leçon que je retiens : voir un psychologue aide à accepter le handicap, à accepter cette « anormalité » et à avancer. Même un groupe de paroles m’aurait aidé. Aucun médecin ne m’en a jamais parlé. Ils devraient inciter les patients à se tourner vers un réseau ou un professionnel pour trouver un soutien. C’est tellement important ! Faire tout, tout seul, a ses limites.
Propos recueillis par Laurence Toulet Delaporte